Alexane Drolet, journaliste chez Radio-Canada, passe au mode indépendant
Alexane était l'une des journalistes « traditionnelles » les plus actives sur les réseaux sociaux au Québec. Désormais, elle embrasse entièrement les nouveaux formats de l'information.
C’est la première fois que je vois ça : une journaliste de Radio-Canada quitte un poste permanent dans un organisme stable – et même vouée à grossir si Mark Carney tient sa promesse – pour lancer sa propre chaîne YouTube et tenter de vivre de son métier de façon indépendante.
Elle n’a pas fait ça comme filet de sauvetage après un licenciement – contrairement à certains autres comme votre humble serviteur (hum, hum…). Elle l’a fait par conviction que l’avenir du métier se trouve, au moins en partie, en dehors des organes de presse traditionnels.
Je vous invite à voir la vidéo où elle explique sa démarche.
Comme vous le savez si vous lisez mes affaires depuis les derniers mois, mon intérêt pour les nouveaux codes du journalisme n’a pas de fond. Je vais suivre l’aventure d’Alexane, et si elle accepte mon invitation j’aurai peut-être même une entrevue à vous partager.
Jusqu’à présent Alexane a laissé filtrer très peu d’informations sur l’allure que prendra son travail (après tout, l’annonce a été fait il y a même pas 24 heures!) et sa chaîne YouTube « Alexplique » n’a pas encore de vidéos.
**Mais quand même plus de 2000 abonnés. Tabarn…**
Elle souligne toutefois un premier défi: ses revenus devront venir de quelque part. Et ce quelque part, ça sera les entreprises privées.
Je serai fort curieux de savoir comment elle va gérer cet aspect-là de son aventure. Une des embûches, c’est que les guides de déontologie du Conseil de presse et de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec contiennent des articles qui dictent que les journalistes doivent éviter de se mettre en situation de conflit d’intérêt et de laisser la publicité influencer leurs choix de couverture.
Soyons clair: même si c’est pas mal l’esprit de la chose, les guides ne disent pas explicitement qu’un journaliste ne peut pas lui-même signer des contrats de publicité. Ils disent seulement qu’il ne faut pas le faire en échange d’une promesse de publier ou de ne pas publier quelque chose. Et il faut aussi s’assurer que, dans la présentation de l’information au public, il y a une distinction claire entre l’information journalistique et le contenu payé (que ce soit du contenu commandité ou une publicité bien traditionnelle).
C’est juste que c’est drôlement plus facile de rester impartial t’es pas toi-même face au client. Le fameux rideau de fer entre la salle de nouvelles et les ventes, ça sert à ça.
Ceci étant dit, je ne suis pas du tout en train de dire qu’Alexane ou qui que ce soit d’autre ne devrait pas suivre ce chemin. Au contraire, j’ai hâte de voir quels seront ses choix, ses astuces. Et je compte bien vous en parler ici!
Autre défi lié aux guides de déontologie: la distinction entre le journalisme factuel et le journalisme d’opinion. Le Conseil de presse fait une distinction claire entre ces deux formes, et tu peux très bien recevoir un blâme du Conseil si, en tant que journaliste, tu laisses trop entrevoir ton opinion dans un reportage.
Or, un des avantages des nouveaux codes sur internet c’est de pouvoir analyser et commenter la nouvelle en même temps que tu la rapportes. Il y a un marché très fort pour ce genre de modèle, surtout parmi les lecteurs et auditeurs plus jeunes.
Ceci étant dit, le journalisme n’est pas une profession aussi rigidement réglementée que, par exemple, la médecine ou le droit. Il n’y a pas d’ordre professionnel pour nous sanctionner pour un manquement déontologique, et il n’est pas nécessaire de suivre les guides du Conseil de presse ou de la FPJQ ni même être membre de ces deux organismes.
Mais mettons que si et quand tu te fais poursuivre pour un reportage, c’est drôlement efficace de pouvoir dire « regardez M. le juge, j’ai suivi toutes les règles généralement acceptées de mon métier ».
Ou « Mme la juge », selon le cas. Mais bon, je m’éloigne du sujet.
La prochaine chose à faire, pour moi, ça sera d’aller regarder ses vidéos. Et, je croise les doigts, l’avoir en entrevue.
D’ici-là, Alexane, je te souhaite bonne chance et bon succès!
Oui car les départements de publicité et de rédaction sont séparés. Cependant, si ils achètent une pub dans une section top 10 des pizzérias et qu'ils sont mystérieusement numéro 1, là c'est problématique. Dans le sports ça se fait déjà (par exemple à tva sports) mais je ne voit pas une chronique sur la politique internationale par exemple avec une boite de pizza ou une bouteille de shampoing sur la table et le nom de la compagnie aux trois mots.
Elle va perdre toute crédibilité. Du journalisme commandité, ça vaut rien